Barbara Strozzi

Arie e Duetti

Gabriel Garrido & Il Segreto Delle Muse

Barbara Strozzi

Une femme d’exception

Barbara Strozzi est une figure marquante de l'histoire de la musique. Née à Venise en 1619, elle est adoptée par Giulio Strozzi (célèbre poète de l’époque), qui est très probablement son véritable père. Giulio Strozzi, qui porte le nom d'une puissante famille florentine, a été à Venise le membre et le fondateur de plusieurs accademie, lieux où les intellectuels se réunissent pour discuter, débattre, innover, déclamer des poèmes, jouer de la musique et échanger des idées. Il y est très influent et c’est notamment dans ces lieux qu’il transmet une riche éducation à la jeune Barbara, et soutient sa carrière musicale. Au sein de ces accademie, Barbara Strozzi fré-quente la crème de la société vénitienne. Des compositeurs, tels que Monteverdi, vantent les livrets de son père et la jeune Barbara, alors qu’elle n’a que 15 ans, reçoit quant à elle les louanges de Nicolò Fontei, au sujet de sa voix. Elle évolue ainsi dans un environ- nement plus que propice à l’enseignement de la musique. Elle bénéficiera d’ailleurs, dès ses premières années d’apprentissage, des enseignements de Francesco Cavalli, le maître del’opéra vénitien. L’œuvre de Barbara est florissante, et en 1637, Giulio Strozzi crée l'Accademia degli Unisoni. Barbara a alors 18 ans. Cette accademia voit probablement le jour pour promouvoir ses représentations et ses œuvres. 

Ses compositions sont bien accueillies, mais le fait qu’une femme fasse partie d’une accademia suscite néanmoins un certain intérêt, et les réunions deviennent si célèbres que des satires entières sont écrites à leur sujet. Il faut en effet avoir toujours à l’esprit que Barbara Strozzi évolue dans une société où les femmes ne vivaient qu’au travers d’un « bon mariage », et n’avaient pas le droit de travail-ler et encore moins d’apprendre la musique. Elle n’aura pourtant jamais la nécessité de se marier, et élèvera seule quatre enfants, tout en vivant de sa musique. Bien qu’elle n’ait pas été la première femme compositrice, sa biographie est exceptionnelle pour une femme et une compositrice de son époque. En effet, dans cette société du XVIIème siècle peu favorable aux femmes, Barbara Strozzi n’en était pas moins une femme libre, intelligente et cultivée qui a publié plus d’œuvres que ses contemporains masculins. Elle publiera en effet, de 1644 à 1664, 125 œuvres sur huit opus. C’est ce personnage marquant qu’Il Sergette delle Muse souhaite faire découvrir au public. Tant elle a marqué son époque par sa modernité, que ce soit au travers de sa musique ou de ses choix de vie.

La musique

Bien qu’elle ne se soit jamais vue commander d’opéra, toute la musique de Barbara Strozzi est remplie d’éléments dramatiques et de l’expression de la poésie sur laquelle la musique est écrite. Outre les coloratures et les ornementations virtuoses, Strozzi utilise les dissonances les plus dures et joue avec leschangements de tempo et de mesure pour exprimer les tournants dramatiques de la poésie. La maîtrise de ces outils rend ses pièces incroyablement variées, presque comme des versions miniatures des opéras de son maître Cavalli, où de courts récitatifs et arias sont assemblés de manière presque fragmentaire en une grande œuvre scénique. Barbara Strozzi a publié ses œuvres avec une grande précision, en laissant de nombreuses notes et indices d’exécution, probablement destinés aux lecteurs qui n’auraient pas assisté à l’exécution originale desdites œuvres. De cette façon, samusique est une source inépuisable de possibilités d’expression à l’époque à Venise et en Italie.

L’interpretation

On ne peut plus de nos jours interpréter une musique du XVIIème italien sans être informé suffisamment du style et de la révolution qui s’opère en Italie à partir de 1600. Plus qu’aucune autre cette musique doit tenir compte de trois facteurs essentiels qui sont du domaine de l’interprète : l’ornementation, l’improvisation et le développement de la basse continue. En effet, ce que le compositeur écrit est déjà plein d’affetti, ou passions de l’âme, selon des codes de ce changement majeur dont Monteverdi est le maître incontesté. Mais celui qui reproduit ces émotions rajoute les siennes, au moyen des trois éléments décrits plus haut, qui deviendront égales et même plus importantes que celles du compositeur.

Nous avons donc essayé dans ce CD de restituer avec la plus grande authenticité possible l’univers sonore de Barbara Strozzi, cette géniale compositrice à l’égal de ses plus grands collègues masculins, qui oblige l’interprète à se surpasser, tant son expressivité et sa virtuosité sont hors normes.

Gabriel Garrido Septembre 2023

Les critiques

Jouant sur l’harmonieuse complémentarité des voix, le duo Begli Occhi voile ainsi d’ombres et d’inquiétudes l’évocation solaire des regards que lance le bien aimé. Enfin, l’ornementation fluide au rubato savoureux de La Riamata, la finesse poétique de Costume de Grandi, les basses inquiétantes et les silences évocateurs de Che si Puo Fare inscrivent cette anthologie parmi les mieux inspirées consacrées à la compositrice”.

Denis Morrier, Diapason, n°734 Juin 2024

Sous la houlette du chef argentin, spécialiste du baroque, Gabriel Garrido, le jeune ensemble Il Segreto delle muse nous offre une interprétation pleine de fraîcheur de ces pages émouvantes et délicates”.

Médiathèque Nouvelle

Émission de radio allemande sur le CD de la radio bavaroise “BR-Klassik”

https://www.br-klassik.de/themen/klassik-entdecken/alte-musik/segretodellemuse-strozzi-arie-100.html

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